Quelle différence y a-t-il entre contribution carbone et greenwashing ?

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Quelle différence y a-t-il entre contribution carbone et greenwashing ?
Après l’Accord de Paris en 2016, 82 pays dont la France se sont engagés à atteindre la « neutralité carbone » en 2050.
Pour atteindre cet ambitieux (et nécessaire) objectif, les particuliers comme les entreprises vont devoir réduire leurs émissions de gaz à effet de serre annuelles pour empêcher les désagréments qu'engendrerait une augmentation de la température de 2°.

Mais que faire des 800.000.000.000 tonnes d'excédent de CO2 atmosphérique accumulées lors des deux derniers siècles ? 🤔 C’est là que le mécanisme de la contribution intervient.

Pour les entreprises deux options s’ouvrent :
  1. Continuer sur un même rythme de pollution et se racheter une conscience en finançant des projets de capture de CO2 = greenwashing.
  2. Mesurer ses émissions, les réduire et financer des projets de capture de CO2 à hauteur de ses émissions incompressibles = contribution carbone.

Eclairage 👇

Qu’est ce que la contribution carbone ?

Mesurer, Réduire, Compenser : les trois inséparables 👨👩👦

Pour pouvoir prétendre à la neutralité carbone, tout individu ou entreprise doit obligatoirement passer par trois étapes :

    Mesurer ses émissions de façon rigoureuse et indépendante. Un bilan carbone de qualité est la pierre angulaire de toute politique climat sérieuse : il permettra de faire un diagnostic complet des émissions de gaz à effet de serre de chaque branche d’une entreprise, afin de fixer les priorités et d’établir un plan d’action.
    Réduire voire cesser complètement ses émissions de gaz à effet de serre en repensant ses pratiques. Pour une entreprise, celà passera par une stratégie bas carbone de long terme dont les objectifs peuvent être validés par des organismes indépendants, comme l’initiative
    Science Based Targets
    (SBTi).

Par exemple, il pourra s’agir de prioriser un approvisionnement en plastique recyclé, de choisir un fournisseur d’énergie renouvelable, d’utiliser la digitalisation de manière raisonnée…

Réduire, réduire… d’accord, mais toute activité engendre forcément des émissions, même réduites au stricte minimum. C’est pour contrebalancer ces émissions inévitables (et uniquement celles-là) qu’existe la compensation carbone. D’ailleurs, ces émissions inévitables sont appelées incompressibles ou résiduelles.

    Ainsi, la contribution ou la compensation carbone concerne donc les émissions carbones incompressibles, c'est-à-dire le CO2 que l’on ne peut ni réduire ni éviter. Il peut s’agir de procédés industriels, du simple déplacement des employés vers leur lieu de travail ou, en agriculture, des déjections animales par exemple.

Alors comment compenser ces émissions ? En utilisant le mécanisme des puits carbone naturels. 🌳

La contribution carbone volontaire permet à une entreprise X, émettrice de 30 tonnes de CO2 incompressibles par an, de financer un projet de puits de carbone équivalent à 30 tonnes de CO2 capturées par an.

⚠️ Notons cependant qu’il est impossible pour une entreprise d’atteindre la neutralité carbone puisqu’elle émettra toujours un minimum de CO2. Aussi, la neutralité carbone est un objectif qui n’a de sens qu’à l’échelle de la planète. En ce sens, on préfère parler de contribution à la neutralité carbone, plutôt que de compensation carbone, qui laisse croire à une “annulation” des du GES émis. C’est ce que nous explique l’ADEME dans un récent rapport : “L’approche à travers laquelle un acteur recherche une neutralité carbone arithmétique, c’est-à-dire que les émissions GES induites par ses activités soient “compensées” par des émissions réduites ou séquestrées chez un tiers, masque le fait qu’il existe encore des leviers d’actions sur son propre périmètre d’activité”.

Qu’est-ce qu’un puit de carbone ? 🌳

Il existe des moyens naturels de capturer le surplus de CO2 présent dans l’atmosphère et de le stocker sur (ou sous) Terre : les puits de carbone naturels.

Le monde du vivant fait pénétrer du carbone dans ses cycles par la création de matière organique : la photosynthèse des végétaux permet de transformer l’eau et le CO2 en glucides et en oxygène, grâce au seul apport énergétique du soleil.

Ce carbone organique peut être stabilisé pendant des siècles si il est transformé en substances stables (bois, coquilles, racines, litières et exsudats racinaires…).

💡Ainsi chaque année l’équivalent de 30% des émissions de CO2 d’origine humaine sont capturés puis stockés par la matière organique.

Il existe de nombreux autres puits de carbone naturels (les océans, les tourbières…) mais les deux plus actionnables par l’homme restent les sols agricoles et les forêts. Il est indispensable de préserver, d’entretenir et d’augmenter la capacité de stockage de ces solutions naturelles au problème du réchauffement climatique.

Le potentiel de stockage de l’agriculture régénératrice est gigantesque. On estime qu’une augmentation annuelle de 0,4% du potentiel de stockage carbone des sols suffirait à compenser l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre de la planète. 📈

Pour cela il faut changer de paradigme agricole et actionner un certain nombre de leviers :

  • Appliquer des couches de composts successifs.
  • Ne pas labourer les sols.
  • Planter des arbres dans les champs
  • Garder une culture en couvert continu.
  • Installer des pâturages tournants.

De son côté, le potentiel de stockage de la reforestation est également conséquent  à condition d’appliquer une gestion sylvicole durable et de préserver les forêts existantes. En France, la forêt capture ainsi 65 millions de tonnes de CO2 ce qui équivaut à 12% des émissions nationales annuelles.

En tout état de cause, les puits de carbone naturels peuvent absorber une partie du surplus de CO2 présent dans l’atmosphère et peuvent ainsi compenser les émissions incompressibles d’une entreprise.  💪

Les organismes de certification & les crédits carbone 🤝

L’efficacité et la transparence des projets de séquestration carbone par des puits de carbone doivent impérativement être constatées par des organismes de certification. Seuls ces derniers sont habilités à “transformer” les tonnes de CO2 capturées ou réduites en crédits carbone où un crédit = une tonne.

La certification de projets de compensation volontaire existe à plusieurs niveaux :

    En France, le ministère de la Transition écologique a mis en place le
    Label Bas-Carbone
    qui  garantit le suivi, la vérification, la traçabilité et la permanence des tonnes de CO2 évitées ou capturées en France. Sont aussi calculées la présence de co-bénéfices sociaux et environnementaux.
  • L’ONU, qui développe ses propres projets de compensation volontaire.
  • La labellisation Gold Standard, un standard mis en place par la Fondation Gold Standard.
  • La labellisation Voluntary Carbon Standard (ou Verra )qui trouve ses fondements dans les mécanismes du protocole de Kyoto.

Ces organismes agissent comme des garants de la qualité des projets, car la pratique de contribution carbone est beaucoup décriée ces derniers mois, du fait de pratiques abusives. ⚠️

Qu’est ce que le greenwashing ? 🚿

Le “greenwashing” est une pratique consistant à rendre public le financement de projets de compensation carbone via des leviers de marketing et de communication, alors même qu’aucun effort de réduction des émissions n’est mis en œuvre.

Littéralement, il s’agit donc de « laver » l’image de la marque afin de la rendre plus « verte ».

Cela renvoie au fait que la politique d’entreprise qui se dit engagée et éco-responsable est en fait une stratégie marketing visant à séduire le consommateur. L’argument « écologique » est donc utilisé à tort et à travers dans le but de servir une image de marque.

A contrario, une politique durable cohérente passe forcément par une phase de réduction des émissions accompagnée d’une compensation des émissions incompressibles.

Le greenwashing peut se décliner sous plusieurs aspects :

  • Une entreprise qui fait un changement presque insignifiant comme remplacer un seul type d’emballage au profit d’un autre, qui est censé être plus respectueux de l’environnement, et qui fait toute sa communication là dessus.
  • Une entreprise qui décline toute son identité de marque autour de « symbole éco-responsable » : la couleur verte, l’utilisation d'éléments naturels dans les visuels (bois, feuilles, …), le lexique, les slogans trompeurs alors qu’elle pollue à foison.
  • Une entreprise qui communique autour de projets de compensation carbone sans y associer de politique de réduction des émissions.
  • Une entreprise qui invente son propre label soit disant « éco-responsable ».

Et il existe malheureusement une multitude d’autres exemples, allant de l’apparence trompeuse au mensonge.

La neutralité carbone, nouveau greenwashing ou réelle avancée ?

Pour le reconnaître, il ne faut pas hésiter à bien se renseigner sur les actions effectives des entreprises : D’où viennent leurs produits ? De quoi sont-ils composés ? Avec quels collaborateurs travaillent-ils ? Qui attribue le label ? 🔎 Trop souvent, lorsque l’on cherche plus en détail, les explications sont succinctes voire inexistantes, les certifications bancales et les engagements sont en réalité des minimum requis par les réglementations françaises ou européennes.

Bien que l’utilisation abusive des termes « biodégradable » et « respectueux de l’environnement » soit passible d’une amende depuis 2019, le greenwashing reste fréquent.

⚠️ Tant que ces pratiques abusives ne seront pas connues de tous, elles pourront continuer d’exister en toute impunité.

Du greenwashing dans la contribution carbone ? 🤨

Bien que la compensation carbone soit un domaine qui, en théorie, ne peut être que bénéfique pour la planète, certaines entreprises perçoivent cette solution comme un échappatoire aux restrictions écologiques.

C’est une manière de se rapprocher de la neutralité carbone en apparence, mais qui en réalité est superficielle, inefficace voire dangereuse. L’ONU elle-même lance l’alerte à l’encontre de cette fausse solution, qui permet aux entreprises non-conscientes de continuer à accroître leurs émissions.

Derrière l’ambition écologique de grande multinationale ou de plus petite entreprise, il est nécessaire d’être prudent sur deux points :

Dans un premier temps, ont-ils fait des démarches de réduction de leur empreinte carbone avant d’avoir recours au crédit ? Si ce n’est pas le cas, les crédits carbone apparaissent alors simplement comme une porte de sortie qui leur permet, plutôt que de repenser leurs pratiques afin de limiter leur empreinte carbone, de racheter la même quantité en crédit carbone.

Dans un second temps, où achètent-ils leurs crédits carbone ? En effet, tous les marchés ne sont pas fiables, d’autant plus lorsque ces derniers sont situés à l’autre bout du monde et sans aucun suivi. En outre, de nombreuses organisations, telle que l’ONF (office national des forêts), proposent des crédits carbone à l’échelle locale et labellisés.

👉🏻 Pour conclure, notons que les pratiques abusives existent dans tous les domaines et finissent toujours pas être percées à jour. La contribution carbone est une pratique nécessaire si l’on veut atteindre en 2050 la neutralité carbone, limiter la hausse des températures à 1,5°C et prendre soin de notre planète. D’après une étude de Gold Standard, entre 2005 et 2016, 329 millions de tonnes de CO2 ont été évitées grâce à des projets de contribution carbone. Le greenwashing dans la contribution carbone concerne seulement une minorité dans le monde de l’entreprise, et cela reste avant tout une démarche importante et à valoriser.

La contribution à la neutralité est un objectif atteignable grâce à tous les acteurs qui sont engagés et qui s’engagent jour après jour.

https://kloros.fr/actualites/vaut-il-mieux-parler-de-compensation-ou-de-contribution-carbonehttps://kloros.fr/actualites/vaut-il-mieux-parler-de-compensation-ou-de-contribution-carbone

https://reseauactionclimat.org/stockage-carbone-sol-rechauffement-climatique/

https://www.4p1000.org/fr

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Candice HEYMAN
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